Loin
des routes balisées - et trop fréquentées -
de l'académisme, loin des
sentes périlleuses du modernisme, Pol Ledent continue de tracer
un chemin
original. Sujet de prédilection pour cet artiste houyetois
: la nature
,"la nature vive " sommes-nous tenté d'écrire, car l'expression
nature morte
n'est vraiment pas ici d'application.
Le
peintre nous invite donc à re-découvrir
avec lui des coins de campagne
que nous pensions connaître, et dont les charmes - trop familiers
? - nous
avaient souvent échappé. " Quelle vanité que
la peinture qui attire
l'admiration par la ressemblance de choses dont on n'admire point les
originaux ! " disait Pascal, prouvant ainsi que, pour génial qu'il
fût, il
n'avait sans doute pas compris grand-chose à l'art. " Quelle merveille
que
la peinture, dirons-nous plutôt, qui nous fait percevoir la beauté dans
les choses où l'on ne pensait pas - ou plus - la trouver ! "
Nous
voici donc sur les bords de la Lesse ou de la Meuse, au plus profond
d'un bois, dans quelque jachère aux confins d'une prairie,
sur une colline
dominant un modeste hameau… Saisonnière, la peinture de
Pol Ledent nous
fait assister à l'explosion printanière des arbres fruitiers,
des
aubépines et des genêts, sur un fond de tendre verdure. Et puis
voici
l'été : la lumière jaillit de partout ; la couleur éclate
en taches
multiples. Coquelicots, bleuets, campanules, berces… les humbles fleurs
des champs mêlent leurs coloris pour enchanter notre regard. Mais déjà,
somptueux, s'annonce l'automne : sous le pinceau de l'artiste, les
feuillages et les ciels se parent des couleurs les plus inattendues. Les
brouillards noient le fond des vallées, les nuages virent au noir, la
neige se met à tout envahir : l'hiver est là !
On
l'aura compris, l'art de Pol Ledent, que les spécialistes
qualifieraient sans doute de postimpressionniste, mérite
d'abord
l'appellation de romantique, au sens le plus noble du terme, car il
s'adresse prioritairement au cœur : sans mièvrerie ni affectation,
l'artiste donne libre cours à une sensibilité authentique. Sensibilité ou
sensualité ? La question mérite au moins d'être posée,
tant semble
perceptible l'attachement quasi physique que porte le peintre à son
sujet.
Techniquement, si la couleur et la lumière dominent, le dessin, discret,
n'est jamais absent, et l'on devine, préalable à l'exécution
de la toile,
une étude minutieuse de sa composition. Bref, par l'authenticité de
son
inspiration et la qualité de sa réalisation, la peinture de Pol
Ledent est
de celles qui transcendent les modes et ont toutes les chances de passerà la postérité. C'est tout le mal que nous pouvons lui souhaiter…
Francis JACQUES, novembre 2001